Depuis l’importante avarie structurelle survenue durant la Transat Jacques Vabre, début novembre 2023, Luke Berry et son équipe travaillent d’arrache-pied pour remettre en état l’Ocean Fifty Le Rire Médecin-Lamotte. Le chantier mobilise une dizaine de personnes à plein temps à Saint-Malo. La remise à l’eau du trimaran est espérée fin avril. Luke Berry détaille les réparations effectuées, qui vont permettre de gagner en fiabilité mais aussi en performance.
C’était dans la nuit du 6 au 7 novembre 2023, quelques heures après le départ de la deuxième étape de la Transat Jacques Vabre, entre Lorient et la Martinique. Dans des conditions difficiles, Luke Berry et Antoine Joubert ont vu le bras bâbord avant se casser, puis le flotteur se désolidariser de la coque centrale. Juste après, le mât est tombé. Pendant un instant, Luke a cru tout perdre. Pourtant, très rapidement, il a trouvé les ressources pour se relancer, soutenu par ses partenaires et son équipe.
Un convoyage atypique pour rallier Saint-Malo
Après le sauvetage de l’Ocean Fifty Le Rire Médecin-Lamotte, il a fallu convoyer le trimaran blessé entre Viveiro, un port situé à l’Est de La Corogne, et son port d’attache de Saint-Malo. « Notre bateau était un peu en kit, raconte Luke. Nous avons positionné et sécurisé le flotteur cassé sur le bras de liaison, puis nous avons mis en place un gréement de fortune avec une partie du mât. Nous avons utilisé des voiles de Hobie 15 et de Mini. Une fois en mer, on avançait plutôt pas mal, environ 5-6 nœuds, au moteur appuyé par les voiles. » Après cinq jours de convoyage, le bateau est arrivé à Saint-Malo, le 19 novembre.
Étape suivante : réparer les dégâts, qui étaient conséquents. Pour cela, Luke Berry s'est rapproché d’un autre skipper de la classe Ocean Fifty, Thibaut Vauchel-Camus. Les deux équipes ont mutualisé les coûts pour monter une grande tente de 700 mètres carré permettant de prévoir un chantier hivernal à l’abri des intempéries. « Cela me tenait à cœur que les réparations s’effectuent à Saint-Malo. Nos locaux sont ici, les membres de mon team vivent ici », précise Luke.
Un bateau en un seul morceau
Avant d’entamer le chantier à proprement parler, il a fallu chercher les causes de l’avarie pour déterminer précisément les travaux à effectuer afin qu’une telle mésaventure ne se reproduise plus à l’avenir. « Depuis son lancement en 2009, ce trimaran a beaucoup navigué, il a été optimisé au fur et à mesure des années, notamment avec l’ajout des foils. Peut-être n’a-t-il pas été suffisamment renforcé, ce qui a entraîné une certaine faiblesse au niveau du composite. Et on ne va pas le nier, on faisait face à des conditions assez extrêmes au moment de l’avarie », confie Luke Berry.
La partie la plus visible du chantier entrepris depuis mi-janvier concerne la réparation des bras, et leur greffage au flotteur bâbord. « Il nous fallait des experts dans ce type de travaux, souligne Luke. J’ai fait appel à l’équipe de Christophe Ancelin, un nom connu dans le milieu du composite. Avec Christophe et les architectes du bateau, nous avons défini un process de réparation et d’optimisation. Trois à quatre personnes sont mobilisées à plein temps sur ce dossier des bras. C’est la partie la plus technique du chantier, celle qui permet d’avoir à nouveau un bateau en un seul morceau. Aujourd’hui, la partie structurelle est terminée, il reste encore un mois de travail avant de tout finaliser. » Luke Berry souhaite en profiter pour améliorer le bateau. « La raideur et la résistance de la plateforme sont des sujets sur lesquels je voulais travailler depuis longtemps. À l’issue de ce chantier, les bras seront renforcés de 10 % pour bien correspondre aux normes et aux coefficients de sécurité. Cela devrait aussi permettre de gagner en performance. »
De nombreux dossiers à gérer
La réparation des bras est loin d’être la seule tâche à accomplir, et c’est Luke Berry et son équipe qui se chargent de tous ces travaux. Le marin détaille : « Nous sommes en charge d’étanchéifier la coque centrale et le flotteur qui ont été bien endommagés. Le mot d’ordre est de faire les réparations très résistantes en prenant le moins de poids possible. Un autre dossier important concerne le mât, qui sera neuf. Nous allons recevoir un tube nu à la fin du mois de février. Ce sera à nous de faire toutes les finitions, ce qui n’est pas une mince affaire. Cela va mobiliser deux personnes pendant un mois. Au passage, nous avons fait une étude pour optimiser l’implantation, des haubans et galhaubans. En parallèle de tout cela, il faut remplacer le trampoline, réparer des appendices, des bâches aéro, le radar mais aussi travailler sur l’électronique, les câblages... Sans oublier tout ce qu’il y a à faire lors d’un chantier hivernal classique. » Luke Berry positive en se disant que cette période très dense et complexe permet à son équipe de monter en compétences. Si le travail à effectuer reste conséquent, la remise à l’eau, prévue fin avril, n’est plus une perspective si lointaine.